EN BREF
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La France, autrefois réputée pour son ingéniosité et sa capacité à innover, se trouve aujourd’hui face à un défi majeur : la productivité. Alors que d’autres nations semblent s’élever, la France semble stagner, voire reculer. Les chiffres parlent d’eux-mêmes, révélant un écart grandissant entre notre économie et celles de nos voisins européens. Mais qu’est-ce qui se cache derrière cette tendance inquiétante ? Est-ce la complexité bureaucratique, le manque d’investissements dans la recherche et le développement, ou encore une culture du travail ancrée dans des valeurs qui peinent à s’adapter aux exigences contemporaines ? En plongeant dans les méandres de cette problématique, nous tenterons de comprendre les raisons profondes de cette érosion de la productivité nationale et ce que cela implique pour l’avenir de notre pays.
Pourquoi la France est-elle en train de perdre la bataille de la productivité ?
La France traverse une période tumultueuse marquée par un recul notable de sa productivité. Ce décrochage s’est accentué en 2023, avec un niveau inférieur de 3,5% par rapport à celui d’avant la pandémie de Covid-19. Cette situation suscite de vives inquiétudes parmi les économistes et les observateurs de la scène économique.
Le contexte politico-économique incertain
La scène politique française est un véritable champ de bataille depuis les dernières élections législatives. Face à une Assemblée nationale fragmentée en trois blocs sans majorité absolue, les interminables négociations pour former un nouveau gouvernement à Matignon plongent les entreprises et les ménages dans une profonde incertitude. Cette situation crée un climat d’attentisme préjudiciable à l’investissement et à l’emploi, contribuant ainsi à la baisse de la productivité.
Les crises multipliées
Les crises successives – pandémie, guerre en Ukraine, crise énergétique – ont aussi durement frappé l’économie tricolore. La trajectoire du produit intérieur brut (PIB) a connu une chute vertigineuse. La productivité a baissé de 3,5% comparé à 2019, selon une récente note de l’Insee. Cette tendance met en lumière un déficit accentué de 5,5% en tenant compte de la projection pré-Covid. La France se retrouve donc en retard par rapport à une zone euro pourtant également malmenée.
Contraste avec les États-Unis
Alors que la productivité en zone euro a reculé d’environ un point comparé à la précédente décennie, les États-Unis connaissent un bond de cinq points par rapport à leur niveau pré-pandémique. Grâce aux plans de relance de Joe Biden et à l’Inflation Reduction Act, l’économie américaine a su tirer profit des défis post-Covid pour booster sa productivité.
Les facteurs énergétiques et industriels
Parmi les causes de ce recul figurent les flambées des prix de l’énergie et des matières premières. La guerre en Ukraine a plongé de nombreux secteurs industriels européens, particulièrement en Allemagne et en France, dans une crise énergétique majeure. Des politiques budgétaires restrictives et de moindres investissements en recherche et développement n’ont fait qu’exacerber cette situation. L’industrie française a aussi fort souffert, un aspect approfondi par des experts tels que Rémi Godeau dans son émission sur l’industrie française.
Augmentation de l’emploi, mais à quel coût ?
Non seulement la France a connu une forte croissance de l’emploi (6,1% de 2019 à 2023 contre 2,8% pour la zone euro), mais cela s’est réalisé au détriment de la productivité. La création massive d’emplois, notamment dans les services où les gains de productivité sont souvent faibles, a pesé lourd sur la performance globale. La réindustrialisation, promue politiquement, n’a pas suffi à inverser la tendance.
Formation et micro-entreprises en plein essor
Le boom de l’apprentissage en France avec une augmentation de 60% des contrats depuis 2019 et la prolifération des micro-entreprises ont aussi eu un impact notable. Bien que bénéfique pour l’emploi, cet accroissement a aussi contribué à la baisse de la productivité. Les apprentis en formation ne sont pas pleinement productifs, et l’augmentation du travail indépendant avec des auto-entrepreneurs souvent sous-occupés a plombé la durée de travail effective.
Rétention de la main-d’Å“uvre pendant la pandémie
La pandémie a encore amplifié ces difficultés. Pour éviter des licenciements massifs et faciliter la reprise, de nombreuses entreprises ont retenu leur personnel grâce au chômage partiel. Ce dispositif, bien que nécessaire, a réduit la productivité moyenne par employé. François Geerolf, professeur d’économie, évoque même une « zombification » de l’économie, posant la question de la viabilité à long terme de certaines entreprises.
En somme, la France se trouve confrontée à un ensemble de défis complexes, où des crises externes, des choix politiques et des dynamiques économiques nationales s’entremêlent pour freiner sa productivité. Aux entrepreneurs et décideurs maintenant de trouver des solutions innovantes pour redresser la barre.